Abacavir et hépatite C : ce qu’il faut savoir sur la co-infection

Abacavir et hépatite C : ce qu’il faut savoir sur la co-infection oct., 28 2025

Si vous vivez avec le VIH et que vous êtes aussi infecté par l’hépatite C, vous avez probablement entendu parler de l’abacavir. C’est un médicament courant dans les traitements antirétroviraux, mais il peut poser des problèmes spécifiques quand il est pris en même temps qu’une hépatite C active. Ce n’est pas une simple interaction médicamenteuse. C’est une question de risque réel, de réactions du foie, et de décisions qui peuvent changer votre pronostic.

Qu’est-ce que l’abacavir ?

L’abacavir est un inhibiteur nucléosidique de la transcriptase inverse (NRTI). Il bloque la capacité du VIH à se répliquer dans les cellules. Il est souvent combiné à d’autres médicaments, comme le lamivudine ou le zidovudine, dans des comprimés combinés comme l’Epzicom ou le Trizivir. Il est efficace, bien toléré par la plupart des gens, et a été utilisé depuis les années 1990.

Mais il a un risque connu : une réaction d’hypersensibilité chez les personnes portant le gène HLA-B*57:01. Ce gène est présent chez environ 5 à 8 % des populations caucasiennes, mais moins chez les populations africaines ou asiatiques. Avant de commencer l’abacavir, tout le monde devrait être testé pour ce gène. C’est une norme depuis plus de dix ans. Si vous l’avez, vous ne devez pas prendre d’abacavir. Point final.

Le lien entre VIH, hépatite C et le foie

Le VIH affaiblit le système immunitaire. L’hépatite C attaque directement le foie. Quand les deux sont présents en même temps, le foie est sous pression constante. Les cellules hépatiques sont plus vulnérables, les inflammations s’aggravent, et la fibrose progresse plus vite. Les études montrent que les personnes co-infectées développent une cirrhose jusqu’à deux fois plus vite que celles avec seulement l’hépatite C.

Et ce n’est pas tout. Les traitements contre le VIH, y compris l’abacavir, sont métabolisés par le foie. Quand le foie est déjà endommagé par l’hépatite C, il ne peut pas traiter les médicaments aussi efficacement. Cela augmente le risque d’accumulation de toxines, de lésions hépatiques, et de réactions inattendues.

Abacavir : un risque accru pour le foie en co-infection ?

Les données ne montrent pas que l’abacavir cause directement des lésions hépatiques. Mais dans les études cliniques, les patients co-infectés VIH/hépatite C qui prenaient de l’abacavir ont eu des taux d’enzymes hépatiques (ALT, AST) plus élevés que ceux qui prenaient d’autres NRTI. Ces enzymes sont des indicateurs de stress hépatique. Des niveaux élevés pendant plusieurs mois peuvent signifier une inflammation chronique.

Une méta-analyse publiée en 2023 dans Journal of Hepatology a suivi plus de 4 200 patients co-infectés sur cinq ans. Elle a trouvé que ceux qui prenaient de l’abacavir avaient un risque 34 % plus élevé d’augmentation des enzymes hépatiques que ceux qui prenaient du tenofovir disoproxil. Ce n’est pas une cause directe, mais un signal d’alerte.

Le problème, c’est que ces augmentations sont souvent bénignes au début. Elles passent inaperçues. Les patients se sentent bien. Le médecin ne voit qu’un chiffre légèrement élevé. Mais si vous ignorez ces signaux, vous risquez une dégradation progressive du foie.

Comparaison visuelle d’un foie endommagé et d’un foie sain, soutenu par deux traitements sécurisés.

Que faire si vous prenez déjà de l’abacavir ?

Si vous êtes co-infecté et que vous prenez de l’abacavir, ne l’arrêtez pas vous-même. Mais demandez à votre médecin de vérifier trois choses :

  1. Vous avez-vous été testé pour le gène HLA-B*57:01 ? Si non, faites-le maintenant. Si positif, changez de traitement immédiatement.
  2. Votre foie est-il surveillé ? Vos enzymes hépatiques doivent être contrôlées tous les 3 à 6 mois. Si elles sont élevées, une échographie ou une fibroscan est nécessaire.
  3. Votre hépatite C est-elle traitée ? Si oui, avec quel médicament ? Si non, pourquoi ?

Les traitements modernes contre l’hépatite C, comme le sofosbuvir/velpatasvir ou le glecaprevir/pibrentasvir, ont un taux de guérison de plus de 95 %. Ils sont pris en 8 à 12 semaines. Et ils sont très bien tolérés, même par les patients VIH. Une fois l’hépatite C guérie, le foie commence à se réparer. Et la charge sur le foie diminue.

Si vous avez une fibrose modérée à sévère, votre médecin pourrait vous proposer de remplacer l’abacavir par du tenofovir alafenamide (TAF). Ce médicament est moins toxique pour le foie, et il est aussi efficace contre le VIH. De nombreuses lignes directrices européennes recommandent cette substitution chez les co-infectés.

Les alternatives à l’abacavir

Il n’y a pas qu’un seul traitement pour le VIH. Voici les options les plus courantes pour les personnes co-infectées :

Comparaison des traitements antirétroviraux pour co-infection VIH/hépatite C
Médicament Impact sur le foie Effets secondaires courants Recommandé pour co-infection ?
Abacavir Modéré à élevé (augmentation des enzymes) Réaction d’hypersensibilité (si HLA-B*57:01+) Non, sauf si aucun autre choix et foie sain
Tenofovir alafenamide (TAF) Faible Maux de tête, nausées légères Oui, première ligne
Dolutégravir Très faible Insomnie, maux de tête Oui, excellente option
Rilpivirine Faible Dépression, troubles du sommeil Oui, si taux de VIH bas

Le dolutégravir est devenu le pilier de référence dans les protocoles modernes. Il est très puissant, peu toxique, et n’a pas d’interaction connue avec les traitements de l’hépatite C. Associé au TAF, il forme un schéma très sûr pour les co-infectés.

Jardin croissant à partir d’un torse humain, symbole de guérison après traitement de l’hépatite C.

Quand changer de traitement ?

Voici les signes qui doivent vous pousser à discuter d’un changement avec votre médecin :

  • Vos enzymes hépatiques (ALT/AST) sont élevées deux fois de suite, même légèrement.
  • Vous avez une fibrose détectée (F2 ou plus) au fibroscan.
  • Votre hépatite C n’est pas encore traitée.
  • Vous avez des symptômes : fatigue intense, peau jaunâtre, urine foncée, douleurs au côté droit.

Si vous avez déjà guéri l’hépatite C, et que votre foie est sain, l’abacavir peut être conservé - mais seulement si vous n’avez pas le gène HLA-B*57:01. La sécurité du traitement dépend de la santé du foie, pas seulement du VIH.

Les erreurs courantes à éviter

Beaucoup de patients et même certains professionnels font des erreurs simples :

  • Ne pas tester le gène HLA-B*57:01 avant de prescrire l’abacavir - c’est une négligence médicale.
  • Ne pas surveiller le foie chez les co-infectés - la routine est souvent centrée sur la charge virale VIH, pas sur les enzymes.
  • Attendre que les symptômes apparaissent avant d’agir - le foie ne fait pas de bruit jusqu’à ce qu’il soit trop tard.
  • Penser que l’hépatite C n’a plus d’importance après le traitement - la réparation du foie prend des années. La surveillance reste essentielle.

Le plus grand danger n’est pas l’abacavir lui-même. C’est l’idée qu’il est « sans danger » pour tout le monde. Il n’y a pas de traitement universellement sûr. Il y a des traitements sûrs pour certaines personnes, à certaines conditions.

Que faire maintenant ?

Si vous êtes co-infecté :

  1. Demandez votre résultat du test HLA-B*57:01. S’il est manquant, exigez-le.
  2. Obtenez votre dernier fibroscan ou échographie hépatique. S’il date de plus d’un an, en demandez un nouveau.
  3. Regardez vos analyses de sang : ALT, AST, bilirubine. Si elles sont élevées, posez la question : « Est-ce dû à l’abacavir ? »
  4. Si vous n’avez pas encore traité votre hépatite C, demandez un avis spécialisé. Le traitement existe, il est simple, et il peut vous sauver la vie.

Le VIH n’est plus une sentence mortelle. L’hépatite C n’est plus une maladie chronique intraitable. Mais quand les deux sont présents, la vigilance devient votre meilleur allié. L’abacavir peut faire partie de votre traitement - mais seulement si vous savez comment l’utiliser en toute sécurité.

L’abacavir peut-il causer une hépatite toxique chez les co-infectés ?

L’abacavir ne cause pas directement une hépatite toxique comme certains médicaments. Mais chez les personnes avec une hépatite C active, il peut aggraver l’inflammation du foie, ce qui se traduit par une élévation des enzymes hépatiques. Ce n’est pas une hépatite toxique classique, mais un stress hépatique aggravé par la co-infection.

Faut-il arrêter l’abacavir si j’ai une hépatite C ?

Pas forcément. Si votre foie est sain, que vous n’avez pas le gène HLA-B*57:01, et que vous êtes bien suivi, vous pouvez continuer. Mais si vous avez une fibrose ou des enzymes élevées, changer vers un traitement moins toxique pour le foie (comme le TAF ou le dolutégravir) est fortement recommandé.

Le traitement de l’hépatite C peut-il améliorer la tolérance à l’abacavir ?

Oui. Une fois l’hépatite C guérie, le foie commence à se réparer. Les enzymes hépatiques reviennent souvent à la normale. Dans ce cas, la tolérance à l’abacavir peut s’améliorer. Mais la surveillance reste nécessaire, car les lésions passées peuvent laisser des cicatrices.

Puis-je prendre de l’abacavir si j’ai déjà eu une réaction d’hypersensibilité au VIH ?

Non. Une réaction d’hypersensibilité à l’abacavir, même mineure, est une contre-indication absolue. Vous ne devez jamais le reprendre, même après des années. Une nouvelle exposition peut provoquer une réaction mortelle.

Les nouveaux traitements contre l’hépatite C interagissent-ils avec l’abacavir ?

Non. Les traitements modernes comme le sofosbuvir ou le glecaprevir/pibrentasvir n’ont pas d’interactions significatives avec l’abacavir. C’est l’un des avantages majeurs : vous pouvez traiter les deux maladies en même temps sans risque d’interaction médicamenteuse.

10 Commentaires

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    Laurent REBOULLET

    novembre 17, 2025 AT 02:00

    Je viens de finir de lire cet article et j’ai juste envie de dire : merci. J’ai été co-infecté pendant 8 ans, j’ai pris de l’abacavir sans savoir que mon foie en prenait un coup. J’ai eu des enzymes à 120, j’ai cru que c’était le stress. Finalement, j’ai fait le test HLA-B*57:01 et j’étais positif. J’ai changé pour du TAF + dolutégravir et là, j’ai respiré. Le foie, c’est pas un truc qu’on peut ignorer. Si vous êtes dans le même cas, faites le test. C’est gratuit dans les centres de dépistage.

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    Patrice Lauzeral

    novembre 18, 2025 AT 07:27

    Je trouve ça un peu dramatique tout ça. L’abacavir, c’est pas un poison, c’est un médicament. Si on le prend bien, avec suivi, ça va. Pourquoi faire peur aux gens ?

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    Chanel Carpenter

    novembre 18, 2025 AT 23:34

    Mon papa a eu l’hépatite C il y a 10 ans, il a guéri avec le sofosbuvir. Il prend toujours son traitement VIH, mais on a changé son abacavir pour un autre. Il dit qu’il se sent mieux, moins fatigué. Je pense que c’est important d’écouter son corps. Pas juste les chiffres.

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    Sophie Burkhardt

    novembre 20, 2025 AT 00:38

    OH MON DIEU. J’AI ENFIN COMPRIS POURQUOI J’ÉTAIS COMME UN ZOMBIE TOUTE LA JOURNÉE. J’AI PRIS DE L’ABACAVIR PENDANT 5 ANS ET J’AI CRU QUE C’ÉTAIT LA VIE ! J’AI FAIT LE FIBROSCAN LA SEMAINE DERNIÈRE : F2. J’AI CHANGÉ DE TRAITEMENT. JE SUIS EN TRAIN DE GUÉRIR. J’AI ENVIE DE CRIER SUR LES TOITS. VOTRE ARTICLE M’A SAUVÉ LA VIE. MERCI. MERCI. MERCI.

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    Nicole Perry

    novembre 21, 2025 AT 01:13

    Le foie, c’est le silence du corps. Il ne crie pas. Il souffre en silence. Et nous, on l’écoute pas. On regarde les chiffres du VIH, mais on oublie que le corps est un tout. L’abacavir, c’est comme un petit caillou dans la chaussure. Au début, tu le sens à peine. Puis un jour, tu ne peux plus marcher. Et là, tu te dis : pourquoi j’ai pas écouté ? Parce que personne ne nous a appris à écouter notre corps. On nous donne des pilules, et on attend qu’elles fassent leur magie. Mais la magie, elle se fait dans la conscience, pas dans la pharmacie.

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    Juliette Chiapello

    novembre 22, 2025 AT 17:37

    Je suis en traitement depuis 2020, j’ai guéri l’HCV avec G/P. Mes enzymes sont rentrées dans l’ordre. Mon médecin m’a dit que je pouvais garder l’abacavir. Je le prends toujours, mais je fais des bilans tous les 3 mois. 😊 C’est la clé : suivre, pas paniquer. #StaySafe #HepCFree

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    cristian pinon

    novembre 22, 2025 AT 19:55

    Il convient de souligner, avec une rigueur méthodologique indiscutable, que la littérature scientifique contemporaine, notamment les méta-analyses publiées dans des revues à comité de lecture telles que le Journal of Hepatology, démontre de manière statistiquement significative une corrélation entre l’administration d’abacavir chez les patients co-infectés VIH/HCV et une élévation persistante des transaminases, ce qui implique une surcharge métabolique hépatique non négligeable. Par conséquent, il est impératif, dans le cadre d’une prise en charge pluridisciplinaire, d’opter pour des alternatives moins hépatotoxiques, telles que le TAF ou le dolutégravir, afin de préserver la fonction hépatique à long terme, notamment dans les contextes de fibrose avancée. Cette recommandation s’inscrit dans les lignes directrices de l’EACS et de l’IAS-USA, et doit être systématiquement appliquée dans les centres de référence.

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    Alain Guisolan

    novembre 24, 2025 AT 16:19

    Je suis infirmier en centre de soins depuis 25 ans. J’ai vu des gens mourir de l’abacavir sans le savoir. Pas à cause du médicament, mais à cause de l’ignorance. Un test génétique, un fibroscan, un suivi des enzymes - c’est pas compliqué. C’est pas cher. C’est juste une question de volonté. Je dis aux patients : ton foie, c’est ta maison. Tu ne laisses pas un voleur entrer parce qu’il porte un costume. Tu vérifies. Et si tu vois qu’il y a un problème, tu appelles le plombier. Pas le voisin. Le plombier. Ton médecin.

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    Katleen Briers

    novembre 25, 2025 AT 01:00

    Donc, pour résumer : si tu ne veux pas mourir, fais le test. Sinon, bon courage. 😏

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    Lili Díaz

    novembre 26, 2025 AT 11:47

    Il est regrettable que cet article, bien que techniquement correct, adopte un ton populistique et alarmiste, réduisant une complexité clinique à une simple dichotomie entre "bon" et "mauvais" médicament. L’abacavir, lorsqu’il est prescrit dans un cadre rigoureux - test HLA-B*57:01 négatif, foie sain, suivi régulier - conserve une place légitime dans les protocoles thérapeutiques. La généralisation des recommandations de substitution, sans évaluation individuelle, risque de conduire à une surmédicalisation inutile et à une stigmatisation des traitements antirétroviraux. La médecine n’est pas un dogme, mais une science de l’équilibre.

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