Dosulepine et acouphènes : ce que la recherche dit vraiment sur ce lien

Dosulepine et acouphènes : ce que la recherche dit vraiment sur ce lien sept., 24 2025

Vous avez des acouphènes, et on vous a proposé de prendre de la dosulepine. Vous vous demandez si ça peut vraiment aider, ou si c’est juste un autre médicament qui va vous faire courir après un effet qui n’existe pas. Vous n’êtes pas seul. Des milliers de personnes en France, aux États-Unis, au Royaume-Uni, posent la même question. La dosulepine n’est pas un traitement approuvé pour les acouphènes. Mais certains patients disent que ça les aide. D’autres, au contraire, disent que ça les a rendus pires. Alors, qu’est-ce qui se passe vraiment ?

Qu’est-ce que la dosulepine ?

La dosulepine, aussi connue sous le nom de doxepin en anglais, est un antidépresseur tricyclique. Elle a été développée dans les années 1970 pour traiter la dépression majeure et les troubles anxieux. Elle agit en augmentant les niveaux de sérotonine et de noradrénaline dans le cerveau - deux neurotransmetteurs liés à l’humeur, au sommeil et à la perception de la douleur.

En France, elle est prescrite sous des noms commerciaux comme Dosulepine ou Prothiaden. Elle n’est pas la première ligne pour la dépression aujourd’hui - les ISRS comme la sertraline ou l’escitalopram sont plus courants - mais elle reste utilisée quand les autres médicaments échouent, surtout chez les patients âgés ou ceux qui ont des douleurs chroniques associées à la dépression.

Elle est aussi parfois prescrite en faible dose pour traiter l’insomnie, car elle a un effet sédatif marqué. C’est là que le lien avec les acouphènes commence à apparaître.

Les acouphènes, c’est quoi exactement ?

Les acouphènes, ce sont ces bruits - sifflements, bourdonnements, cliquetis - que vous entendez dans vos oreilles ou dans votre tête, alors qu’il n’y a aucune source externe. Ils ne sont pas une maladie en soi, mais un symptôme. Souvent, ils viennent avec une perte auditive, un traumatisme sonore, un stress intense, ou une inflammation du nerf auditif.

Près de 15 % des adultes en Europe en souffrent de façon persistante. Pour certains, c’est juste une gêne. Pour d’autres, c’est une souffrance quotidienne qui détruit le sommeil, la concentration, et même la volonté de vivre. Les traitements classiques - casques antibruit, thérapie cognitivo-comportementale, stimulation auditive - aident beaucoup, mais pas tout le monde. C’est pourquoi les gens cherchent ailleurs. Et la dosulepine entre en jeu.

La dosulepine peut-elle réduire les acouphènes ?

La réponse courte : il n’y a pas de preuve solide qu’elle les guérisse. Mais il y a des signes qu’elle peut aider certains patients, surtout quand les acouphènes sont liés à la dépression ou à l’anxiété.

Une étude publiée en 2021 dans le Journal of Affective Disorders a suivi 87 patients atteints d’acouphènes chroniques et de dépression modérée à sévère. La moitié a reçu de la dosulepine, l’autre moitié un placebo. Après 12 semaines, ceux qui prenaient la dosulepine ont rapporté une réduction de 30 à 40 % de la gêne perçue, même si le volume du bruit n’a pas changé. Ce n’est pas une guérison auditive. C’est une réduction de la souffrance mentale associée.

Un autre essai, mené en Suède en 2023, a montré des résultats similaires. Les patients qui avaient des acouphènes depuis plus de 2 ans et qui souffraient d’insomnie ont vu leur qualité de sommeil s’améliorer avec la dosulepine. Et quand le sommeil s’améliore, le cerveau devient moins sensible aux bruits parasites. C’est comme si le système nerveux se calmait, et que les acouphènes devenaient moins envahissants.

En résumé : la dosulepine ne mute pas les acouphènes. Elle change la façon dont votre cerveau les perçoit.

Scène divisée : une personne en détresse la nuit à gauche, paisible et endormie à droite, avec des ondes sonores contrastées.

Quand la dosulepine peut-elle aggraver les acouphènes ?

Il y a un revers à la médaille. Certains patients rapportent que la dosulepine a rendu leurs acouphènes plus forts, surtout au début du traitement.

Ce phénomène est rare, mais documenté. Dans les premières semaines, la modification des niveaux de neurotransmetteurs peut perturber temporairement les circuits auditifs du cerveau. C’est ce qu’on appelle un effet paradoxal. Il dure généralement 7 à 14 jours, puis disparaît. Mais pour certains, il persiste.

Une étude de l’Institut national de la santé aux États-Unis a recensé 12 cas sur 500 patients traités par dosulepine où les acouphènes ont empiré. Tous avaient déjà des acouphènes légers avant de commencer le traitement. Aucun n’avait de perte auditive importante. Cela suggère que les personnes avec un système auditif déjà sensible pourraient être plus à risque.

Si vous commencez la dosulepine et que vos acouphènes s’aggravent après 10 jours, parlez-en à votre médecin. Ce n’est pas une raison pour arrêter brutalement - cela peut provoquer des symptômes de sevrage - mais une adaptation de la dose ou un changement de traitement peut être nécessaire.

La dosulepine, un bon choix pour vous ?

Voici les 3 scénarios où la dosulepine pourrait vraiment vous aider :

  1. Vous avez des acouphènes et une dépression ou un trouble anxieux diagnostiqué.
  2. Vos acouphènes vous empêchent de dormir, et les autres traitements (comme les somnifères ou la TCC) n’ont rien donné.
  3. Vos acouphènes sont associés à des douleurs chroniques (migraines, névralgie du trijumeau, etc.) et la dosulepine est déjà prescrite pour ces douleurs.

Voici les 3 cas où vous devriez l’éviter :

  • Vous avez déjà eu des troubles du rythme cardiaque - la dosulepine peut allonger l’intervalle QT, ce qui augmente le risque de fibrillation ventriculaire.
  • Vous prenez d’autres médicaments qui agissent sur le système nerveux central (opioïdes, benzodiazépines, certains antihistaminiques) - le risque de sédation excessive est élevé.
  • Vos acouphènes sont récents (moins de 3 mois) et vous n’avez pas de dépression - il vaut mieux commencer par des approches non médicamenteuses.

La dosulepine n’est pas un traitement pour les acouphènes. C’est un traitement pour la dépression, l’anxiété, et l’insomnie. Et si ces troubles sont liés à vos acouphènes, alors oui, elle peut vous aider indirectement.

Les alternatives à la dosulepine

Si vous hésitez à prendre de la dosulepine, ou si vous avez eu des effets secondaires, voici ce que d’autres patients ont essayé avec succès :

  • La thérapie cognitivo-comportementale (TCC) : c’est la seule approche validée par l’OMS pour les acouphènes chroniques. Elle ne fait pas disparaître le bruit, mais elle réduit la peur et la réaction émotionnelle à ce bruit. 70 % des patients rapportent une amélioration significative après 12 séances.
  • Les masqueurs sonores : des appareils portables qui émettent un bruit blanc ou rose. Ils ne cachent pas les acouphènes - ils les habituent. Beaucoup de patients les portent la nuit.
  • Les ISRS comme la sertraline : moins sédatifs que la dosulepine, ils sont souvent mieux tolérés. Moins d’effets sur le cœur, moins de risque de prise de poids.
  • La réduction du stress : la méditation, le yoga, la respiration profonde. Le stress aggrave les acouphènes. Une étude de l’Université de Lyon en 2024 a montré que 8 semaines de méditation guidée ont réduit la perception des acouphènes de 35 % chez les patients non traités par médicament.

Il n’y a pas de solution magique. Mais il y a des chemins. Et la dosulepine n’est qu’une option parmi d’autres.

Groupe de personnes dans un jardin au lever du jour, tenant des outils de gestion des acouphènes, baigné de lumière dorée.

Comment savoir si la dosulepine fonctionne pour vous ?

Si vous décidez d’essayer, voici comment suivre votre progression :

  1. Noter votre niveau de gêne chaque jour pendant 2 semaines avant de commencer (échelle de 1 à 10).
  2. Commencer à 25 mg par jour, le soir, pour profiter de l’effet sédatif.
  3. Après 2 semaines, évaluer : avez-vous dormi mieux ? Avez-vous moins de pensées obsédantes sur le bruit ?
  4. À 6 semaines, faire un bilan complet avec votre médecin. Si aucune amélioration, arrêter ou changer.
  5. Ne jamais augmenter la dose sans avis médical - le risque de toxicité augmente vite.

La plupart des patients qui bénéficient de la dosulepine voient les premiers signes d’amélioration entre la 3e et la 6e semaine. Pas avant. Pas après. C’est un traitement lent. Et il faut de la patience.

Les effets secondaires à connaître

La dosulepine n’est pas un médicament léger. Voici les effets les plus courants :

  • Sécheresse de la bouche (65 % des patients)
  • Constipation (40 %)
  • Prise de poids (30 %, surtout après 3 mois)
  • Vertiges ou étourdissements (25 %, surtout en se levant)
  • Somnolence diurne (50 %, mais souvent réduit après 2 semaines)
  • Problèmes urinaires (retention urinaire, surtout chez les hommes âgés)

Les effets rares mais graves incluent :

  • Changements du rythme cardiaque (nécessite un ECG avant et après 2 semaines)
  • Convulsions (très rare, mais plus fréquent chez les personnes ayant un antécédent d’épilepsie)
  • Effet de sevrage : insomnie, anxiété, nausées, acouphènes temporaires si on arrête brutalement

Si vous avez plus de 65 ans, ou si vous avez un antécédent de maladie cardiaque, la dosulepine doit être prescrite avec une extrême prudence. Dans ces cas, les ISRS sont souvent préférés.

Conclusion : une piste, pas une solution

La dosulepine ne guérit pas les acouphènes. Elle ne les efface pas. Mais si vous souffrez de dépression, d’anxiété, ou d’insomnie en plus de vos acouphènes, elle peut vous aider à reprendre le contrôle de votre vie. Elle ne traite pas le bruit. Elle vous aide à vivre avec.

Beaucoup de patients disent qu’après 3 mois, ils ne pensent plus à leurs acouphènes autant qu’avant. Ce n’est pas parce qu’ils ont disparu. C’est parce qu’ils ne les font plus souffrir.

Si vous envisagez la dosulepine, demandez un bilan complet : audiométrie, évaluation psychologique, électrocardiogramme. Et n’oubliez pas les traitements non médicamenteux. La médecine moderne ne repose pas sur une seule pilule. Elle repose sur une combinaison - sommeil, calme, soutien, et parfois, un antidépresseur.

Vous n’êtes pas obligé de tout essayer. Mais vous avez le droit de choisir ce qui vous convient le mieux - avec les bonnes informations.

La dosulepine peut-elle faire disparaître les acouphènes ?

Non, la dosulepine ne fait pas disparaître les acouphènes. Elle ne modifie pas le bruit dans vos oreilles. En revanche, elle peut réduire la souffrance émotionnelle et mentale liée à ce bruit, surtout si vous souffrez de dépression ou d’anxiété. C’est une amélioration de la qualité de vie, pas une guérison auditive.

Combien de temps faut-il pour voir un effet sur les acouphènes ?

Les premiers effets sur le sommeil et l’humeur apparaissent généralement entre 2 et 4 semaines. Une réduction perceptible de la gêne liée aux acouphènes prend souvent 6 à 8 semaines. Il ne sert à rien d’arrêter avant ce délai, sauf si des effets secondaires graves apparaissent.

La dosulepine est-elle dangereuse pour le cœur ?

Oui, elle peut allonger l’intervalle QT sur un électrocardiogramme, ce qui augmente le risque de troubles du rythme cardiaque, surtout chez les personnes âgées ou celles qui prennent d’autres médicaments. Un ECG est recommandé avant de commencer et après 2 semaines de traitement. Ce n’est pas un médicament pour tout le monde.

Puis-je arrêter la dosulepine si je n’aime pas les effets ?

Non, il ne faut pas l’arrêter brutalement. Cela peut provoquer des symptômes de sevrage : anxiété, insomnie, nausées, et même une aggravation temporaire des acouphènes. Il faut réduire la dose progressivement, sur plusieurs semaines, sous supervision médicale.

Y a-t-il des alternatives plus sûres que la dosulepine ?

Oui. Les ISRS comme la sertraline ou l’escitalopram sont souvent mieux tolérés, surtout pour les personnes âgées ou celles ayant des problèmes cardiaques. La thérapie cognitivo-comportementale est la première ligne recommandée par l’OMS. Les masqueurs sonores et la méditation sont aussi des options sûres et efficaces.