Goître : Agrandissement de la thyroïde et supplémentation en iode

Goître : Agrandissement de la thyroïde et supplémentation en iode déc., 8 2025

Un goître, c’est simplement une thyroïde qui a grossi. Pas toujours visible, mais souvent détectable au toucher ou à l’échographie. Dans les régions où le sel n’est pas iodé, c’est souvent le signe d’un manque d’iode. Mais ici, en France ou aux États-Unis, ce n’est plus la cause principale. La thyroïde, cette petite glande en forme de papillon au bas du cou, produit des hormones essentielles pour le métabolisme, la croissance, la température corporelle… Quand elle grossit, ce n’est pas toujours un cancer. Souvent, c’est une réaction à un déséquilibre. Et comprendre pourquoi elle grossit change tout dans la façon de la traiter.

Qu’est-ce qui fait grossir la thyroïde ?

La cause la plus courante dans le monde, c’est encore la déficience en iode. Sans assez d’iode, la thyroïde ne peut pas fabriquer ses hormones. Alors elle travaille en surrégime, se contracte, se dilate, et finit par grossir pour capter chaque molécule d’iode disponible. C’est comme un moteur qui tourne à vide pour essayer de produire de la puissance. Dans les pays où le sel n’est pas iodé, jusqu’à 90 % des goitres viennent de ça. Mais dans les pays industrialisés, c’est différent. Ici, c’est surtout les maladies auto-immunes qui sont en cause. Le hashimoto - une attaque du système immunitaire contre la thyroïde - est le numéro un. La glande s’enflamme, se détruit lentement, puis se remplace par du tissu fibreux. Résultat : un goître dur, souvent accompagné d’une fatigue persistante, d’un gain de poids, d’une peau sèche. L’autre grand coupable, c’est le graves, une maladie où la thyroïde produit trop d’hormones, devient hyperactive, et grossit en même temps. Là, ce n’est pas un manque, c’est un excès. Et le corps réagit en formant un goître toxique.

Combien de gens sont concernés ?

Environ 5 % de la population américaine a un goître. Chez les femmes, c’est presque trois fois plus fréquent qu’chez les hommes. Et ça augmente avec l’âge : après 40 ans, le risque double. En France, les données sont moins précises, mais les études montrent une baisse constante depuis les années 1980, grâce à la fortification du sel. Pourtant, certains groupes restent vulnérables : les femmes enceintes, les personnes âgées, celles qui suivent un régime sans sel. La thyroïde normale pèse entre 15 et 20 grammes. Quand elle dépasse 25 millilitres - soit la taille d’une petite noix - on parle de goître. Dans les cas sévères, elle peut atteindre 50 à 100 grammes. C’est alors qu’elle commence à comprimer la trachée, la gorge, ou les nerfs vocaux. La voix devient rauque, la respiration devient difficile, surtout quand on s’allonge. Manger devient un effort.

L’iode : le pilier de la solution

L’iode, c’est l’élément clé. Sans lui, la thyroïde ne peut pas faire son travail. L’Organisation mondiale de la santé recommande 150 microgrammes par jour pour un adulte. Pendant la grossesse, ça monte à 220 microgrammes, et à 290 pendant l’allaitement. Le sel iodé contient environ 45 microgrammes par gramme. Donc, une bonne pincée de sel par jour suffit à couvrir les besoins. Mais attention : les sels de table « naturels » comme le sel de l’Himalaya ou le sel marin ne contiennent pas d’iode ajouté. Ils ne protègent pas. Pour les personnes en déficience, les suppléments de iodure de potassium à 150 mcg par jour sont efficaces. Dans les zones à risque, les programmes de supplémentation ont réduit les goitres de moitié depuis les années 1990. Chez les patients avec un goître dû à un manque d’iode, la prise d’iode pendant 6 à 12 mois réduit la taille de la glande de 30 à 40 %. Et dans 70 à 85 % des cas, le goître disparaît complètement.

Femme vérifiant un goître au cou, entourée de symboles des maladies auto-immunes sous une lumière douce du matin.

Et si ce n’est pas un manque d’iode ?

Si la thyroïde grossit sans déficience en iode, l’approche change. Pour le hashimoto, on ne supplémente pas en iode. On remplace les hormones manquantes avec de la lévothyroxine. La dose typique est de 1,6 microgramme par kilo de poids corporel. Ça rétablit le métabolisme, mais la taille de la thyroïde ne diminue que de 10 à 20 %. Pourquoi ? Parce que la glande est déjà endommagée, fibrosée. L’iode ne peut pas la réparer. Pour le graves, on utilise des médicaments comme le méthimazole, à raison de 5 à 30 mg par jour. Ça calme la surproduction d’hormones. En 12 à 18 mois, le goître réduit de 40 à 60 %. Mais il y a un piège : si on ne traite pas bien, la thyroïde peut continuer à grossir ou devenir toxique.

Quand faut-il opérer ou utiliser l’iode radioactif ?

Quand le goître est trop gros - plus de 80 à 100 millilitres - ou qu’il comprime les voies respiratoires ou digestives, on parle de chirurgie. Une thyroïdectomie totale enlève entre 30 et 40 grammes de tissu. C’est efficace, mais ça a des risques : une voix changée (15 % des cas), des problèmes de calcium (8 %), et une vie entière de supplémentation hormonale. L’autre option, c’est l’iodure radioactif. On le prend par voie orale. Il détruit les cellules thyroïdiennes hyperactives. En 6 à 12 mois, la taille diminue de 50 à 60 %. Mais il y a un inconvénient majeur : 75 à 80 % des patients finissent hypothyroïdiens à vie. Ce n’est pas un traitement « magique ». C’est un échange : on éteint la suractivité, mais on perd la production naturelle.

Le sélénium : une piste intéressante ?

On entend souvent parler du sélénium pour la thyroïde. C’est un minéral présent dans les noix du Brésil, les œufs, le poisson. Certains pensent qu’il calme l’inflammation auto-immune. Mais les données sont contradictoires. Une revue Cochrane de 2021 a montré que le sélénium n’a aucun effet significatif sur la réduction du goître. Pourtant, certaines lignes directrices européennes suggèrent qu’il pourrait aider dans des cas spécifiques de hashimoto, surtout si les anticorps sont élevés. Pas de preuve solide. Pas de recommandation universelle. À utiliser avec prudence, pas comme une solution miracle.

Arbre géant aux racines en forme de thyroïde, avec des fruits d'iode récoltés par des personnes de différents âges.

Le futur : génétique et nouvelles pistes

La recherche avance. Le projet TRIPOD, financé par les NIH en 2023, étudie 5 000 personnes dans 10 pays pour identifier les gènes liés à la taille de la thyroïde. Déjà, 37 régions du génome sont suspectées. Cela pourrait permettre de prédire qui est à risque, et de prévenir avant que le goître ne se développe. Le marché mondial des traitements thyroïdiens devrait atteindre 6,3 milliards de dollars d’ici 2027. La lévothyroxine représente 85 % des prescriptions aux États-Unis - plus de 120 millions de boîtes par an. Ce n’est pas juste une question de santé. C’est une industrie massive. Mais ce qui compte, c’est que chaque patient reçoive le bon traitement au bon moment.

Comment savoir si vous avez un goître ?

Regardez-vous dans un miroir en inclinant la tête en arrière. Avalez de l’eau. Voyez-vous une bosse qui monte et descend ? C’est un signe. Ensuite, passez la main doucement sur le bas du cou. Sentez-vous une zone dure, enflée, ou asymétrique ? Si oui, consultez. Un médecin peut faire une échographie pour mesurer la taille. Un dosage de la TSH, de la T3 et de la T4 révèle si la glande produit trop ou trop peu d’hormones. Des tests d’anticorps (anti-TPO, anti-thyroglobuline) confirment une cause auto-immune. Ce n’est pas un diagnostic à faire soi-même. Mais être vigilant, c’est déjà la moitié du chemin.

Que faire au quotidien ?

  • Utilisez du sel iodé dans la cuisine - mais pas en excès. 5 grammes par jour suffisent.
  • Évitez les régimes sans sel, surtout si vous êtes femme, enceinte, ou âgée.
  • Si vous avez un goître, ne prenez pas d’iode sans avis médical. Un excès peut aggraver un hashimoto.
  • Consommez des aliments naturellement riches en iode : poissons de mer, algues, œufs, produits laitiers.
  • Ne vous fiez pas aux compléments « naturels » non réglementés. Certains contiennent des doses dangereuses.

Un goître peut-il disparaître tout seul ?

Rarement. Un goître dû à une déficience en iode peut régresser avec une supplémentation adaptée, dans 70 à 85 % des cas. Mais si la cause est auto-immune, comme le hashimoto, le goître ne disparaît pas sans traitement. Il peut même continuer à grossir lentement. Même si vous ne ressentez rien, un goître non traité peut devenir un problème de compression ou évoluer vers une hypothyroïdie.

Est-ce que le sel marin ou le sel de l’Himalaya contient de l’iode ?

Non. Ces sels sont naturels, mais ils ne contiennent pas d’iode ajouté. L’iode qu’ils contiennent est minime et variable. Pour prévenir ou traiter un goître, vous avez besoin d’un sel spécifiquement iodé - celui qui a été enrichi en iodure de potassium ou en iodate de potassium. Sans cette fortification, vous ne couvrirez pas vos besoins quotidiens.

La supplémentation en iode est-elle dangereuse ?

Oui, si vous n’avez pas de déficience. Chez les personnes atteintes de maladies auto-immunes comme le hashimoto ou le graves, un excès d’iode peut déclencher ou aggraver la maladie. C’est ce qu’on appelle l’effet de Wolff-Chaikoff. En France, les suppléments d’iode sont vendus sans ordonnance, mais ils doivent être pris avec prudence. Une dose journalière de 150 mcg est sûre pour la plupart. Au-delà de 1 100 mcg par jour, le risque de troubles thyroïdiens augmente.

Pourquoi les femmes sont-elles plus touchées que les hommes ?

Les femmes ont un système immunitaire plus réactif, ce qui les rend plus vulnérables aux maladies auto-immunes comme le hashimoto. Les fluctuations hormonales - pendant la grossesse, la ménopause, ou même le cycle menstruel - peuvent aussi déclencher ou exacerber une inflammation thyroïdienne. En plus, les besoins en iode augmentent pendant la grossesse et l’allaitement. Tous ces facteurs combinés expliquent pourquoi 7,5 % des femmes ont un goître contre seulement 2,5 % des hommes.

Faut-il éviter les aliments comme le chou ou les navets ?

Non, pas en quantités normales. Ces aliments contiennent des goitrines, des substances qui peuvent interférer avec la production d’hormones. Mais elles sont inactivées par la cuisson. Manger du chou cru en très grandes quantités - plusieurs cents grammes par jour - pourrait poser problème, surtout si vous avez déjà une déficience en iode. Dans le régime quotidien, ce n’est pas un risque. L’idée qu’il faut éviter les légumes croisés est un mythe. Mangez-les, cuits, avec modération.

Quand faut-il consulter un endocrinologue ?

Dès que vous remarquez une bosse au cou, surtout si elle grossit, si vous avez une voix rauque, une difficulté à avaler, ou des symptômes de fatigue, de prise de poids, ou d’agitation. Un médecin généraliste peut faire les premiers tests, mais un endocrinologue saura interpréter les résultats, décider entre supplémentation, médicaments ou chirurgie, et suivre l’évolution sur le long terme. Ne laissez pas un goître sans suivi. Même s’il ne gêne pas maintenant, il peut devenir un problème sérieux plus tard.